portrait du chef eric guerin par le photographe Matthieu Cellard à l'occasion de la sortie de son livre
Revue de Presse | 10 mars 2017

Challenges | 2 au 8 mars 2017

Eric Guérin, chef étoilé et poète hors norme de La Mare aux Oiseaux par Philippe Couderc.

Le poète du marais

Bon vivant, mais redoutable, cet étoilé hors norme sert une «cuisine d’auteur» inspirée par ses états d’âme et les paysages de sa mythique Grande Brière.

Cheveu broussaille, visage Janus en rondeurs de bon vivant, mais traits aussi de redoutable interlocuteur : c’est Eric Guérin. Eclatant son rire carnassier, fulgurant son regard laser ; la barbe en éparpillée encadre une « impériale » soignée de mousquetaire. Nonchalance souriante maîtrisée en sous-main de l’homme sûr de lui et un physique d’une forte puissance sous-jacente.

Un vêtu qui subodore le chasseur, le pêcheur, le voyageur. Deux boucles d’oreille le feraient pirate si ce n’était de l’humour comme cette ceinture siglée de son nom : les tendances, il les fait lui, et il s’en amuse. Le verbe suivra, introspection comprise. Comédien sans doute : sa première ou seconde nature ? Mieux vaut exister en face de lui : alors à le découvrir, on gagne beaucoup.

Depuis vingt ans, dans cet univers mythique de la Grande Brière qui fut sa jeunesse. Devenue sa raison de vivre. Horizons grandiloquents d’une nature impérieuse, pittoresque de maisons chevelues de chaume (logis en « cabanes » coquettes-cossues) entre jardin d’eaux, superbes volatiles en représentation, déco de bric, de broc et de coeur. Plus un fabuleux sens de la com avec deux attachées de presse et un agent !

Sa cuisine : très honnête, ébouriffée, bonne (le service, en revanche, un peu trop « tendance » hélas !). « Cuisine d’auteur », insiste-t-il. Je précise : des mets sur lesquels il met des mots et des mots sur lesquels il met des mets. Ceux-ci et ceux-là sous influence des lieux, de ses états d’âme, de ses humeurs, de ses voyages, de la musique de l’instant, de la couleur du ciel…. Poète, enthousiaste sous perfusion des énergies envoûtantes de « sa » Grande Brière. Un rien pataphilosophe, il assume son emphase littéraire, modérée dans son adaptation culinaire. Habile, il jongle de tous les styles, plus abouti sur la tradition, doué sur les jus et les sauces, malin sur la modernité, d’une inventivité provocante : cuistot Protée s’il en est !

Alors, quelques plats : purée fumée à la tourbe de Brière, saint-jacques en transparences, sarcelle rôtie pommes au chou rouge ; mikado d’anguille en tempura ; brochet et bouillon de roquette aux huîtres ; boeuf de Brière ; canard à l’orange ; pigeons ; langoustine juste déshabillée, etc. A changer selon son bon plaisir. Cela dit, la présence de cet étoilé hors norme s’impose : sinon, pas négociable, remettez !

Qualité-prix : 16/20 ; Cuisine : 15/20 ; Menus : 45-78 euros ; Carte produits : 16-36 euros ; Chambres : 180-290 euros.
La Mare aux Oiseaux 223, rue du chef de l’île Fedrun. Saint-Joachim (44270 Loire- Atlantique) ; Tél. : 02-40-88-53-01.